L’application de la Charte du football professionnel dans les litiges prud’hommaux

Match OL-PSG Pierre Lacroix

La Charte du football professionnel a valeur de convention collective

La Charte du football professionnel a valeur de convention collective (Cass. soc., 26 sept. 2012, no 11-18.783), ce qui lui confère une portée contraignante dans les relations entre clubs et joueurs.

Néanmoins, la Cour de cassation a eu l’occasion de limiter la portée de certains articles de la Charte, qui se heurtaient aux dispositions impératives du Code du travail :

Pas d’obligation de saisir la Commission juridique avant le Conseil de prud’hommes

L’article 271 de la Charte du football professionnel, qui régit les relations contractuelles entre joueurs et clubs, précise que tous les litiges relatifs aux contrats de travail sont de la compétence de la commission juridique de la Ligue de football professionnel (LFP).
Toutefois, la Cour de cassation a clarifié et atténué la portée de cet article en indiquant qu’il n’institue pas une procédure de conciliation préalable obligatoire.

En effet, dans une affaire récente (Cass. soc., 29 nov. 2023, no 21-19.282 FS-B), un club relégué en division inférieure a proposé à l’un de ses joueurs une réduction de salaire, que celui-ci a refusée. Le club a mis fin au contrat et le joueur a saisi la justice pour obtenir réparation. Le club a contesté cette action en soutenant que la saisine de la commission juridique était un préalable obligatoire avant toute saisine de la juridiction prud’homale.

Cependant, la Cour de cassation a rejeté cet argument. Elle a affirmé que l’article 271 de la Charte ne prévoit pas une obligation de conciliation avant de saisir la justice. La cour d’appel avait donc raison de juger que la contestation de la rupture du contrat pouvait être directement portée devant le Conseil de prud’hommes, juridiction de première instance compétente en matière de litiges individuels du travail.

Dès lors, saisir la Commission est une faculté, mais pas une obligation qui empêcherait l’action prud’hommale.

Sur le fond : les dispositions impératives du Code du travail priment sur la Charte

De plus, le club s’appuyait sur l’article 761 de la Charte du football professionnel, qui permet de proposer une diminution de salaire en cas de relégation. En cas de refus du joueur, son contrat est censé être rompu sans indemnité. Toutefois, la Cour de cassation a rappelé que les dispositions de l’article L. 1243-1 du Code du travail, qui encadrent strictement les motifs de rupture anticipée des CDD (accord des parties, faute grave, force majeure ou inaptitude), sont d’ordre public et ne peuvent être contournées par la Charte du football professionnel ou par le contrat.

Il s’agit d’une décision somme toute logique : la Charte du Football Professionnel étant une convention collective, elle s’insère à ce titre dans la hiérarchie des normes avec le principe de faveur propre au droit du travail : une convention collective peut comporter des stipulations plus favorables aux salariés que les dispositions légales en vigueur et ne peut déroger aux dispositions qui revêtent un caractère d’ordre public.

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